Les Tribulations d’un pianiste en URSS raconte le parcours étonnant du pianiste Irakly Avaliani. Ce livre est l’œuvre d’Hervé Gicquiau, ancien observateur et analyste dans un centre d’études sur l’URSS, parfait connaisseur de l’histoire politique et économique de l’URSS, en même temps que fin mélomane et fondateur de l’association « Affinités autour d’un piano ».
Après des études brillantes au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou, Irakly Avaliani commence une carrière de concertiste au sein d’une agence de concert du régime dont il est salarié moyennant une quantité impressionnante de prestations. Mais le pianiste ne trouve aucun intérêt à jouer ses programmes : il a l’impression d’être un robot et non un artiste ; sa manière de jouer du piano ne le satisfait pas au point qu’il songe à changer de métier…
Mais là, une rencontre va être déterminante : celle d’Ethery Djakeli, née Rouchadzé, pianiste géorgienne comme lui, qui, après avoir remporté un Prix de piano au Conservatoire de Paris, avait retravaillé toute son approche pianistique au Conservatoire Royal de Bruxelles dans la classe d’Eduardo del Pueyo, lequel enseignait la méthode si particulière qu’avait mise au point au début de XXème siècle la pianiste française Marie Jaëll. Ethery Djakeli comprend tout de suite le potentiel énorme d’Irakly Avaliani et surtout son désir profond d’acquérir une manière de jouer qui réponde à ses attentes.
Le pianiste accepte de réapprendre le piano depuis zéro, passant plusieurs mois à jouer une seule voire deux notes, à chercher à rétablir la conscience des fonctions motrices que le travail mécanique de l’enseignement traditionnel avait détruit. Dix ans de travail seront nécessaires pour construire le jeu pianistique dont Irakly Avaliani avait besoin pour traduire enfin les subtilités d’interprétation qu’il nourrissait depuis toujours sans pouvoir les exprimer.
En 1989, après plusieurs demandes, le pianiste est enfin autorisé à se rendre en France pour une tournée de concerts. Au même moment le rideau de fer s’écroule. Le pianiste comprend que son destin se joue désormais en France. Il obtient la naturalisation française, il est nommé professeur à Laon, et, soutenu par un couple de mécènes, il commence à enregistrer à son rythme les œuvres qui lui tiennent à cœur, à commencer par Brahms mais aussi Beethoven, Scarlatti, Bach…
La vie d’Irakly Avaliani est aussi passionnante qu’un roman. En toile de fond, suivre les tribulations du pianiste en URSS, c’est aussi être immergé dans l’univers particulièrement terrible d’un citoyen de l’empire soviétique avec les difficiles conditions de vie, les insupportables autorisations de séjour et de transport, les dénonciations… Mais l’essentiel est bien-sûr ce parcours fascinant, cette volonté inflexible de concrétiser ses aspirations, cette persévérance exemplaire dans une remise en question complète du travail pourtant acharné fourni depuis son plus jeune âge, ce qu’Hervé Gicquiau retrace admirablement.
A noter qu’Irakly Avaliani se produira le samedi 23 novembre à Paris, au Reid Hall, 4, rue de Chevreuse (6ème), dans un programme Bach, Brahms, Schubert.
Frédéric Boucher, pour aubonheurdupiano.com, 13 novembre 2019
Bonjour, merci pour cet article. Je suis impatiente de découvrir ce livre. J’ai découvert par hasard Irakly Avaliani un jour à la fnac en cherchant de nouveaux disques dans ceux en libre écoute. Et il y avait ce CD de cet interprète. le vendeur m’explique que ce pianiste n’arrive pas à se faire produire et s’autoproduit mais qu’on lui prête un piano Fazioli (mon rêve ultime d’en avoir un jour un, pour en avoir essayé…). Nous devions être au début des années 2000….. Et depuis, je n’avais pas trop suivi son parcours. donc merci.
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Merci beaucoup pour votre commentaire.
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