Né à Barcelone en 1893, Federico Mompou a séjourné en France durant plusieurs décennies avant de retourner dans sa ville natale passer les quarante-six dernières années de sa vie et y mourir en 1987. Influencé par Debussy, Satie et Ravel, Mompou a, hors des modes et des systèmes, créé à partir du folklore catalan une musique qui n’appartient qu’à lui. Musique intimiste caractérisée par une économie de moyens, une recherche intuitive des sonorités, un attrait pour les résonances – souvenir conscient ou inconscient de la profession de ses grands-parents fondeurs de cloches –, un goût pour les nuances les plus subtiles, l’œuvre de Mompou, principalement constituée de pièces pour piano et de mélodies, est d’une poésie inégalable où transparaissent son hypersensibilité et son imagination fertile.
Ce CD, publié chez Mirare, comprend l’intégralité des Cançons i Danses composées entre 1921 et 1978 dans lesquelles Mompou puise ses thèmes dans le folklore catalan, les Paisajes, trois paysages qui tiennent évidemment davantage de l’évocation poétique que de la notation pittoresque, les Scènes d’enfants où se mêlent la tristesse et l’espièglerie, enfin, comme une sorte de bis, la troisième pièce du premier cahier des Música callada.
Il faut toute la science d’un pianiste de haute volée pour traduire avec une telle simplicité la mélancolie émouvante et la profondeur souvent teintée de mysticisme de la culture ibérique, pour reproduire sur le piano cet art du chant si caractéristique de la musique folklorique avec ses innombrables inflexions de nuances. J’avais découvert Luis-Fernando Perez il y a quelques années, écoutant à la radio des extraits de son CD de sonates du Padre Soler qui avait obtenu de nombreuses récompenses, à l’instar du suivant consacré à Chopin, tous deux publiés également chez Mirare. On retrouve dans ce nouveau disque l’immense talent et la sensibilité aiguë de ce jeune pianiste espagnol et je souscris complètement à ce compliment paru en mai 2010 sur le site concertclassic.com : « Luis Fernando Pérez est d’ores et déjà l’un des pianistes majeurs de sa génération (…) il suffit d’entendre quelques minutes de ce piano si différent pour que l’on en prenne immédiatement toute la mesure.»
Frédéric Boucher, pour Au bonheur du piano, 16 mars 2018
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